[...suite de ~ICI~]

Une question taraudait l’esprit de la jeune voleuse : pourquoi ? Pourquoi diable fallait-il TOUJOURS qu’il lui arrive quelque chose. A présent elle en était sûre et certaine, elle portait la poisse. Pendant quelques minutes… et ce pour la deuxième fois en moins de 24 heures, Faith avait oubliée ses malheurs. Et cela, elle le devait à Daëlan. Incontestablement. Elle s’était sentie presque… normal. Elle avait eu la terrible mais agréable impression d’être comme une autre fille de son âge. Qu’elle aussi, elle pourrait être heureuse. Se contentait d’une vie simple et paisible. Loin de toutes ces escarmouches. De ces courses poursuites. De cette dépendance à l’argent. Et de ce fait, proche d’un autre avenir qu’elle ne discernait même pas en rêve.

Quelques instants plutôt, elle se voyait encore entrain de mimer ses acrobaties et feintes lorsqu’elle s’était emparée de l’Œil de Chat. L’Insaisissable avait alors prit un ton théâtrale et s’était mise à lui retranscrire quasi mot pour mot la scène du grand paladin et elle. En modifiant évidemment l’histoire à sa sauce. Expliquant que ce grand paladin, avait lâché ses subalternes sur elle pour la stopper. Mais qu’elle avait été plus maligne qu’eux et avait réussi à s’échapper. Que voulez-vous, c’est Faith. Mentir pour se magnifier de temps à autres fait aussi partit de son caractère…

Néanmoins, la jeune femme se souvient encore de ce qu’elle était entrain de dire. Ou plutôt de ce qu’elle aurait voulu dire :

-Dit dit dit Daëlan, ça te dirait de… Avait-elle commencée d’un air mi-excitée, mi-timide.

*… travailler avec moi.*

Mais elle n’en avait pas eu le temps. Quelques secondes plus tard, les ténèbres l’avalèrent toute entière. Au début elle avait cru que ses paupières ne voulaient plus se soulever. Puis, elle comprit rapidement qu’il s’agissait d’autre chose. Tout avait changé autour d’elle. Le rire de Daëlan s’était évanoui. L’odeur de pain chaude et d’huile de ses inventions avaient disparues en un battement de cil. Les cliquetis, les fumées qui s’échappaient en vrombissant avaient également été happé d’un seul coup dans cette nouvelle dimension encore inconnue. La chaleur de sa maison avait été remplacée par un froid hostile. Lorsqu’elle ouvrait la bouche, aucuns sons ne daignaient en sortir. Faith ne voyait même pas son nez.

*Je suis morte… ?* Songea-t-elle incrédule.

Le temps semblait s’être figé. S’était comme ça, quand on mourrait ? Voilà ce que l’on voyait ? Ce que l’on sentait ? Encore de la solitude ? Ce sentiment ne lui était déjà que trop familier…

*J’suis sans doute morte d’une crise cardiaque ou d’un autre truc tiré par les cheveux…* Pensa la voleuse avec une pointe d’amertume.

La jeune femme aux cheveux dorés avait toujours cru qu’elle mourrait en tant qu’Insaisissable. Guillotinée en place publique probablement après avoir été connu dans tout Astrune. Ou alors dans les sombres rues des bas quartiers, assassiné part un chasseur de tête. Ou encore en combat. Quelque chose de plus… noble qu’une simple crise cardiaque. Pendant quelques instants, Faith imagina d’innombrables morts. Et fut quelque peu honteuse de mourir aussi stupidement.

*J’espère au moins que je ne suis pas morte en une posture stupide…* Se dit-elle comme pour essayer de minimiser l’ampleur de cette réalité qui s’offrait à elle.

Elle enlaça ses jambes et les serrèrent contre sa poitrine de toute ses forces. Peut-être en aillant l’idée que si elle n’économisait pas le peu de chaleur qui lui restait, son âme allait… se perdre.

*Daëlan…*

Elle aurait bien aimée lui dire au moins au revoir. Le serrer dans ses bras et peut-être même sentir une fois encore son odeur. Peut-être ne méritait-elle pas cette maigre consolation. Le Destin et les Dieux s’étaient bel et bien joués d’elle… Du début… jusqu’à la fin. Avait-elle été une sorte d’expérience ou quelque chose du genre. Un cobaye ? Faith sentit une larme couler le long de sa joue. Décidément… le sort s’acharnait contre elle.

Daëlan n'eut pas le temps d'entendre la fin de la proposition de Faith, qui avait semblé particulièrement excitée par l'idée qui avait subitement germé dans son esprit. En une fraction de seconde, il avait ressenti une sensation mystérieuse, une force inconnue qui avait aspiré tout son être pour le retirer d'Astrune. L'atmosphère régnant dans le refuge de l'Insaisissable disparut rapidement pour laisser place à un air plutôt frais, et surtout, surtout, ce noir, ce vide, ce néant profond qui submergeait autant sa vision que ses sens perceptifs. C'était comme s'il avait fermé les paupières alors qu'il se trouvait déjà dans l'obscurité la plus totale. Il s'était alors assoupi puis s'était réveillé en se demandant bien où il pouvait bien se trouver alors qu'il y a à peine quelques minutes, il savait très bien où il était. C'était des choses qui arrivent, notamment lorsqu'il s'agissait d'un endroit étranger, mais pas souvent.

- Ow... Décidément, il faut toujours que je finisse dans le noir...

Combien de temps venait de s'écouler ? Il s'en fichait. Comment était-il arrivé là ? Pourquoi était-il là ? Voilà des questions auxquelles il aurait bien aimé avoir réponse. Suite à son "réveil", il s'était redressé et avait tendu les bras autour de lui, tâtonnant dans le vide à la recherche d'un quelconque mur. Il fit quelques pas en vérifiant s'il posait bien le pied sur la même surface où il était installé. Il fit à peine deux mètres et finit par toucher du bout des doigts une paroi dure. En faisant rapidement une courte exploration, il en conclut qu'il était à nouveau dans une cage qui devait faire entre un ou deux mètres². Bon sang ! Pourquoi le Destin s'acharnait-il à le mettre en cage ? Il avait donné des coups de poings, à deux reprises, sur les parois et s'était aperçu de l'inutilité de son action. En levant la main, il toucha aussitôt le plafond de sa prison qui était situé à une dizaine de centimètres au-dessus de son crâne. Lassé par un tel jet du sort, il avait fini par s'écrouler sur son postérieur et avait réalisé qu'il entendait des sons métalliques provenant de lui-même : il n'avait même pas remarqué qu'il portait encore son armure. Sa robuste épée et son grand bouclier était rangé dans son dos.

- A force, je finis par m'y habituer...

Il esquissa un sourire narquois, puis l'absence de Faith se fit sentir. Où était-elle ? Etait-elle restée là-bas ? Quelle tête devait-elle faire en voyant que cet homme aux cheveux blonds qu'elle avait délivré avait fini par disparaître comme ça ? A cet instant, le guerrier pensa qu'il était trop paisible pour un prisonnier. Le stress et l'inquiétude s'étaient enfouis au plus profond de son coeur. Quiconque qui se trouvait dans sa propre situation serait sans doute effrayé, apeuré par un tel phénomène auquel il n'y comprenait rien. Daëlan se frotta les tempes et en conclut qu'il était trop exténué pour pouvoir laisser la tension monter en lui. Il poussa un long soupir et s'affala dans un coin de sa cage. Là, il ferma les yeux. Pourquoi les ouvrir alors qu'il se trouvait déjà dans les ténèbres ? De plus, la fraîcheur des lieux et cette neutralité qui émanait de la cage imposaient en lui un semblant de relaxation. Il était enfermé, certes, personne n'était ici avec lui, certes, mais il savait qu'il ne restera pas indéfiniment cloîtré à cet endroit. S'il était ici, il y avait une raison.

Le Lion quitta le monde dans lequel il se trouvait pour rejoindre celui de Morphée, ou un tout autre univers réservé à ceux et celles qui laissaient leur corps au repos.